Les poètes n’hibernent pas

En 2020, je suis invitée en résidence par la maison de la poésie de Normandie.

Je participe à différentes rencontres auprès d’élèves de collège axée sur la place de l’oralité dans l’écriture. Je propose différents exercices basés sur le souffle, la diction, la marche, l’espace pour les conduire vers la recherche de leurs voix. J’échange avec eux autour de l’arpentage d’un territoire.

Tout au long de cette résidence, je déambule dans la ville de Val de Reuil et j’écris une dérive poétique.

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Extraits

1975.

Val de Reuil,
ils s’installent dans ville encore en chantier
peintures encore fraîches dans couloirs des immeubles
cloisons montées à l’envers
boue à la première pluie
absence d’éclairage public

Tu te cherches dans la nuit,
à Val de Reuil.

1984.

Tu visionnes un film,
propagande pour ville nouvelle,
pour installation à Val de Reuil. 
sur un pont rouge,
deux femmes marchent,
leurs fichus à carreaux dans les cheveux,
la voix off : 
« l’espaj est un foyer résidence pour personnes âgées,
récemment ouvert,
qui contribue déjà à équilibrer la réalité de la ville nouvelle
sur le plan social, mais aussi par son architecture,
imposante et sereine ».

Tu visionnes une fin de vie tranquille
tu erres
tu coches les petites annonces
tu décoches les mots fléchés
tu peluches la peau de l’horizon
tu traverses le monde assoupi
tu passes dans un linceul